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3 juin 2015

Sarah Waters - "Derrière la porte"

Waters

WATERS Sarah - "Derrière la porte".

700 pages.

Éditions Denoël (2015).

«Angleterre, 1922. La guerre a laissé un monde sans hommes. Frances, vingt-six ans, promise à un avenir de vieille fille revêche, habite une grande maison dans une banlieue paisible de Londres avec sa mère. Pour payer leurs dettes, elles doivent sous-louer un étage. L’arrivée de Lilian et de Leonard Barber, tout juste mariés, va bousculer leurs habitudes mais aussi leur sens des convenances. Frances découvre, inquiète et fascinée, le mode de vie des nouveaux arrivants : rires, éclats de voix, musique du gramophone fusent à tous les étages. Une relation inattendue entre Frances et Lilian va bouleverser l’harmonie qui régnait dans la maison. Dans les bras de Lil, Frances découvre des plaisirs qu’elle croyait interdits, et les deux jeunes femmes songent bientôt à tout quitter pour vivre ensemble. Mais lorsque Lil découvre qu’elle est enceinte… Sarah Waters revisite les codes du roman de classe cher à la tradition britannique et dépeint un Londres en pleine tourmente dans un mélodrame sensuel et envoûtant.»

INCIPIT: "Les Barber avaient dit qu'ils arriveraient vers trois heures." 

8 - Pur délire

NE LISEZ PAS LA QUATRIEME DE COUVERTURE!!!!

Grande fan de Sarah Waters, dont j'ai lu deux pépites "Du bout des doigts" et "Affinités";  je n'ai pu m'empêcher de me jeter sur ce pavé de 700 pages. J'ai donc passé une semaine immergée dans l'univers de Frances et de sa petite vie tranquille de potentielle vieille fille.

Bien sûr, j'enrage que la quatrième de couverture révèle au pauvre lecteur plus de la moitié du récit, qu'elle dise tout de la relation qui va grandir dans cette maison de la petite bourgeoisie, qu'elle révèle l'élément déclencheur de tout ce drame si passionnant, vécu au plus près. Malgré tout, malgré ça, le récit de Sarah Waters garde toute son ampleur et sa saveur.

Frances, au fil des pages prend totalement corps, au travers de la plume de Sarah Waters. Elle devient de chair et d'os, tellement l'auteur la décrit dans ses moindres détails, ses actes les plus anodins, ses pensées les plus intimes. Le lecteur s'investit totalement dans le personnage, et se dédoublerait presque, tellement les détails sont soignés, tellement l'atmosphère est ciselée, tellement l'Angleterre des années 20 semble renaître sous ses yeux. C'est impressionnant.

Au moment où les sentiments commencent à tourner en rond, où l'intrigue s'éssouffler, l'auteur dépose une bombe au pied du lecteur, qui relance d'un coup tout l'intérêt du récit. Et encore une fois, Sarah Waters décortique les évènements, laisse planer les doutes, accentue le suspense, et rend la vie de ses personnages insupportable d'angoisse et de non-dits.

Les personnages évoluent au fil des évènements et des tragédies de la vie. Le roman est surtout axé sur les trois femmes: Frances, Liliane et Mrs Wray. Chacune va faire face aux chamboulements de cette existence rangée selon son expérience personnelle, mais cela va être pénible. Le personnage de Frances est encore une fois le plus passionnant, le mieux développé. La jeune femme devient plus ombrageuse, renfermée, voire déprimée, au bord du burn-out. Liliane est plus distante, le lecteur la cerne moins facilement. Est-elle aussi naïve qu'elle le paraît ou bien cache-t-elle autre chose? Le lecteur attend un revirement de situation de sa part à chaque nouvelle page tournée. 

Les masques tombent au fur et à mesure des pages qui se tournent. Tout s'emboîte à la perfection et le lecteur espère le dénouement avec impatience - voire à certains instants avec lassitude. Beaucoup moins machiavélique que ses romans précédents, le lecteur attend sans rien voire venir. Sarah Waters mène tout de même son intrigue exactement là où elle le désire. Et jusqu'aux derniers mots, jusqu'à la dernière phrase, l'expectative est de mise.

 

étoileétoileétoileétoileétoileétoileétoile

Oyez, Oyez probables lecteurs de ce magnifique roman. Ne lisez pas la quatrième de couverture, sous peine de vous faire spoiler plus de 300 pages d'une lecture passionnante!
"Derrière la porte" est un roman de moeurs passionnant, dans l'Angeterre pudibonde (j'adore ce mot!!) des années 20. Malgré de légères longueurs - atténuées par un claquement de porte retentissant, qui laisse le lecteur ébété, le temps de réaliser que le récit continue et qu'il serait temps de reconnecter - l'auteur prend plaisir à jouer avec les nerfs et referme finalement la porte de Champion Hill de façon moins explosive que prévu.
Je remercie les Editions Denoël de leur confiance.
CITATIONS: "Quand tout va bien, on ne pense pas à toutes ces couleurs au-dessous; sinon, ce serait à devenir fou. On ne pense qu'à la dernière couleur, celle que l'on voit. Mais pourtant elles sont là, cachées. Toutes les disputes, toutes les petites méchancetés. Et de temps en temps, quelque chose arrive, qui écaille la peinture; et là, on ne peut plus ne pas y penser. (...) Ne vous mariez jamais Miss Wray."
"Etait-ce là ce qui arrivait, se demanda-t-elle, quand on se liait d'amitié avec une femme mariée? Devait-on obligatoirement prendre son mari avec - comme un canevas de napperon en supplément gratuit d'un magazine?"
"(...) il lui semblait vibrer et tinter intérieurement comme un verre de cristal que l'on vient de heurter."
"Simplement, il y avait cette chose en plus, à présent, une flamme éblouissante au centre de ses jours, qui illuminait comme un vitrail multicolore la pauvre lanterne, si terne, qu'était auparavant sa vie."
"Tellement idiote! Si on pouvait mourir d'idiotie, je crois que je serai tombée raide, à la seconde..."
"... toutes les deux dans leur petit coin de pierre, leurs vêtements sombres ensanglantés par le crépuscule, les lumières qui s'allumaient peu à peu à travers la ville, et quelques pâles étoiles au ciel."

denoel

Challenge ABC 2015

 

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Commentaires
N
Ce livre me tentait beaucoup mais j'ai lu des avis assez mitigés... mais ton billet me tente de nouveau
Répondre
L
J'ai suivi ton conseil, je n'ai pas lu la quatrième de couverture ! En revanche, j'ai dévoré ton billet fort tentant, merci :)
Répondre
L
Ce livre me tente beaucoup ! :)
Répondre
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