John Irving - "Les rêves des autres".
IRVING John - "Les rêves des autres"
200 pages.
Éditions Seuil (1993).
«Elles sont sept, ces nouvelles réunies pour la première fois en un volume, contrepoint à une œuvre romanesque foisonnante.
Pour sa plus grande joie, le lecteur y retrouvera ce qu'il connaît : la satire du conformisme, l'imagination débridée, le goût du burlesque, les tabous joyeusement pourfendus - cette vitalité hors du commun qui permet à l'auteur de passer indemne par-dessus les gouffres de ses obsessions. Mais certains y découvriront aussi, parfois, le récit à mi-voix, la description en demi-teinte, la profondeur et l'humanité du propos qui font ici d'Irving un nouvelliste à l'égal de Katherine Mansfield ou du Joyce des Dublinois.»
INCIPIT: "Fred n'avait pas souvenir d'avoir jamais rêvé la nuit, avant que sa femme le quitte."
Fan inconditionnelle de John Irving, j'ai lu presque tous ces romans, à part le dernier en date, car les critiques que des proches m'en ont fait n'étaient pas fameuses, et ayant moult autres romans à lire, je me suis dit qu'il attendrait. "Les rêves des autres" est un recueil de nouvelles, au nombre de sept: celle qui a donné son nom au livre, puis "Un énergumène passe à table", "L’espace intérieur", "Dans un état proche de l’Iowa", "Un royaume de lassitude", "Faut-il sauver Peggy Sneed ?", "Mon dîner à la Maison Blanche".
"Les rêves des autres" propose un concept captivant et original, Fred, qui vient d'être quitté par sa femme commence à faire des rêves - chose étrange sachant qu'il n'a pas le souvenir d'avoir jamais rêver - mais encore plus étrange, il fait les rêves de la personne qui a dormi à l'endroit où il dort. Il expérimente ainsi le lit conjugal, le lit de son enfant, le canapé...
"Un énergumène passe à table" est le récit d'un dîner entre gens polis et plus intelligents que la moyenne selon leurs propres dires, mais finalement c'est celui qui y paraît le moins, qui les mouche tous. Trop bon! ^^A les repas délirants, dès cette évocation, je ne peux m'empêcher de penser "Au dîner de cons". Culte.
"L’espace intérieur" est une prise de tête sans nom digne de John Irving, sur des aspects mineurs de la vie qui deviennent plus qu'envahissants. Ici, tout tourne autour d'un magnifique noyer américain ainsi que de quelques problèmes urologiques (ça se dit?!). Une belle tranche d'humour et une esquisse de ce qui fait le style de l'auteur.
"Dans un état proche de l’Iowa" est un road trip en volvo rouge. Un homme ordinaire s'assoit dans la voiture et roule droit devant. Le véhicule est considéré par son conducteur comme un individu à part entière. Il souhaite emmener sa voiture au bout, mais au bout de quoi... Une nouvelle a l'humour grinçant, mais tellement ordinaire.
"Un royaume de lassitude" est la nouvelle qui m'est le plus rester en mémoire, sachant que cela fait un mois facile que j'ai lu ce roman, cette remarque compte dans mon appréciation. L'histoire se déroule dans un foyer pour jeune fille, où Minna travaille. Son avenir est tout tracé, dans quelques temps elle aura finit de travailler et se retirera chez sa sœur, pour devenir la tata gâteau. En attendant, elle aurait besoin d'un peu d'aider pour le travail au foyer. La nouvelle venue va bouleverser ça façon de voir la vie.
"Faut-il sauver Peggy Sneed ?" est une anecdote autobiographique de l'auteur, avec pour thème majeur la cruauté des enfants envers un éboueur un peu simple d'esprit. John Irving se sert de ce récit pour aborder son travail d'écrivain, et dévoile ainsi au lecteur assidu un aperçu de sa façon de voir le monde à travers sa plume.
"Mon dîner à la Maison Blanche" est également un récit autobiographique dans lequel il est question de politique, au moment des élections de 1992 entre Bush et Clinton.
Ce recueil de nouvelles donne un nouvel aperçu des qualités et du style de John Irving. Ces nouvelles parues dans des revues entre 1968 et 1993 sont disparates et de qualité variables, mais cela reste du Irving quoi qu'on en dise. Étonnamment (?), j'ai préféré les deux nouvelles les plus développées : "Un royaume de lassitude" et "L'espace intérieur". Je pense me lancer en 2016 sur une (re)lecture intégrale de l'oeuvre de John Irving. On y croit! Au moins j'aurai un prétexte pour acheter des livres. ;)
CITATIONS: "Tant il est vrai que, à dormir avec des inconnus, nous avons souvent couru les risques sans jouir du plaisir."
"Son cigare était rallumé, il passait son verre à digestif sous son nez comme il l'aurait fait d'une fleur."
"Dehors' l'arbre condamné le futur amputé, se frottait à la fenêtre comme un chat contre votre jambe."
"Les buts du petit matin font partie des ces illusions qu'il faut entretenir si l'on compte aller où que ce soit."
"Il avait plu dans l'après-midi, une pluie odorante, qui s'était évaporée sur les trottoirs, laissant les rues presque sèches à l'exception de rares flaques tièdes. L'air du soir avec cette touffeur suffocante d'une laverie automatique."