"1984" de George Orwell, pp. 438 - Ed. Folio - 1985.
4ème de couv.
De tous les carrefours importants, le visage à la moustache noire vous fixait du regard. Il y en avait un sur le mur d'en face. BIG BROTHER VOUS REGARDE, répétait la légende, tandis que le regard des yeux noirs pénétrait les yeux de WINSTON... Au loin, un hélicoptère glissa entre les toits, plana un moment, telle une mouche bleue, puis repartit comme une flèche, dans un vol courbe. C'était une patrouille qui venait mettre le nez aux fenêtres des gens. Mais les patrouilles n'avaient pas d'importance. Seule comptait la Police de la Pensée.
Première phrase.
"C'était une journée d'avril froide et claire. Les horloges sonnaient treize heures. Winston Smith, le menton rentré dans le cou, s'efforçait d'éviter le vent mauvais. Il passa rapidement la porte vitrée du bloc des "Maisons de la Victoire", pas assez rapidement cependant pour empêcher que s'engouffre en même temps que lui un tourbillon de poussière et de sable."
Citations.
"On devait vivre, on vivait, car l'habitude devient instinct, en admettant que tout son émis était entendu et que, sauf dans l'obscurité, tout mouvement était perçu."
"Mais la rage que ressentait chacun était une émotion abstraite, indirecte, que l'on pouvait tourner d'un objet vers un autre comme la flamme d'un photophore."
"Les conséquences d'un acte sont incluses dans l'acte lui-même. Il écrivit: Le crime de penser n'entraîne pas la mort. Le crime de penser est la mort."
"Là était l'ultime subtilité. Persuader consciemment l'inconscient, puis devenir ensuite inconscient de l'acte d'hypnose que l'on vient de perpétrer. La compréhension même du mot "double pensée" impliquait l'emploi de la double pensée."
"L'histoire s'est arrêtée. Rien n'existe qu'un présent éternel dans lequel le Parti a toujours raison."
"Ne voyez-vous pas que le véritable but du novlangue est de restreindre les limites de la pensée? A la fin, nous rendrons littéralement impossible le crime par la pensée car il n'y aura plus de mots pour l'exprimer."
"L'essentiel de la règle oligarchique n'est pas l'héritage de père en fils, mais la persistance d'une certaine vue du monde et d'un certain mode de vie imposée par les morts aux vivants."
Lilly's feeling.
Il va être très dur de parler de ce roman sans spoiler, tellement il est dense. On a envie de débattre des pensées et idées développées avec quelqu'un à la fin d'une lecture comme celle-ci. "1984" est un livre flippant, pas au sens d'un livre ordinaire où il y aurait des scènes de violence, mais davantage sur le plan des idées qu'il développe et de la société qu'il dévoile. Il fait invariablement réfléchir le lecteur sur la société qui l'entoure. J'ai d'ailleurs du prendre un peu de recul avant d'écrire cette chronique afin de digérer cette lecture et ses "enseignements"(?).
Pour la petite histoire, qui découle de l'Histoire, Orwell a écrit "1984" en 1948, juste après la seconde guerre mondiale. Il évoque un régime totalitaire inspiré du stalinisme et du nazisme.
Ce roman d'anticipation évoque donc le régime totalitaire du Parti (Angsoc) dont le slogan est: "la guerre c'est la paix. La liberté c'est l'esclavage. L'ignorance c'est la force." Le monde décrit par Orwell est tellement crédible qu'il en est effrayant. Cela pourrait totalement se produire un jour ou l'autre.
"1984" se divise en trois parties. Dans la première partie il y a peu d'action, le lecteur écoute les pensées de Winston, et assiste à la mise en place de cette dictature, de ce monopole du pouvoir par le Parti. Une fois ces éléments posés, le lecteur est pris au piège par l'histoire. Il veut savoir si le héros (?) sera un rebelle ou un non-être, et plus il avance dans sa lecture plus le malaise grandit et la paranoïa s'intalle. La mécanique du Parti est une machine impitoyable qui broie sans pitié l'individu et sa liberté de pensée, au profit du pouvoir d'un petit groupe de dirigeants, le Parti intérieur avec à sa tête Big Brother. La seconde aborde principalement les concepts de politique et de pouvoir, à travers la propagande notamment et la délation et la peur de la police de la pensée. Chacun est perdu en tant qu'individu au milieu de la masse. Diviser pour mieux régner pourrait être un concept de Big Brother. L'auteur mène le récit de telle manière qu'à la fin, la boucle et bouclée et le lecteur scotché, désarçonné ou tout ce que vous voudrez, mais sûrement pas indifférent.
George Orwell a un style simple mais efficace et oppressant dans l'ensemble, même s'il y a certaines longueurs notamment pendant la lecture du livre de Goldstein qui reprend en grande partie les pensées personnelles de winston évoquées précédemment.
Un point qui m'a particulièrement intéressée est cette nouvelle langue imaginée par Orwell. Le novlangue dont le concept est de diminuer le vocabulaire pour limiter et contrôler les pensées de tout individu, et ainsi empêcher chacun de penser par lui même. Il y a par exemple le Ministère de la Vérité qui en novlangue devient le Miniver. Orwell s'appuie ici sur le concept des abréviations et des contractions. Il donne un exemple parlant : "Communisme International" devient "Comintern"...
PS: Pour ceux qui ont lu ou liront ce livre, le moment qui m'a le plus choqué c'est "les deux minutes de la Haine"...
En bref.
Cette lecture est dérangeante mais fortement conseillée car elle fait réfléchir et rien que pour ça c'est bien. Je ne pense pas le relire un jour, mais je ne regrette pas de l'avoir fait, même si plus de deux semaines après je ne sais toujours pas si je l'ai aimé. Je pense que pendant quelques temps je guetterais avec effroi les prémices du Parti dans notre société...
Mes compagnons de [LC] organisée par Léo Elfique: Hidile, Aurélie.,Korto, Ceinwin, Lau1307, Tchae.