Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Just one more page
5 septembre 2015

Joyce Carol Oates - "Nous étions les Mulvaney"

Oates 

OATES Joyce Carol - "Nous étions les Mulvaney"

695 pages.

Éditions Le livre de poche (2011).

«Chez les Mulvaney, on forme une famille unie, soudée, aimante, une joyeuse tribu composée du père Michael, chef d'entreprise, des quatre enfants, Michael Junior, Patrick, Marianne et Judd, le narrateur, et de Corinne la mère, un rayon de soleil, dynamique et débordante de charité chrétienne. Bien qu'un drame couve on le pressent dès le début du roman pendant des années rien ne perturbe ce paradis familial. Mais, un jour de 1976, par une belle soirée de fête au collège, Marianne est violée. La famille entière sombre dans la sordide réalité de l'Amérique rurale. Désirs de vengeance, peurs, chacun à son tour quitte la maison. Seule Marianne garde la nostalgie du passé. Récit d'une traversée du désert, d'une déchéance annoncée, la saga de la famille Mulvaney tire pourtant sa révérence sur une note d'espoir. Un grand roman classique et séditieux, à la sauce américaine.»    
INCIPIT: "Nous étions les Mulvaney, vous vous souvenez?" 

6 - Bon moment de lecture

Joyce Carol Oates est une auteur très prolifique, l'une de mes préférées, et pourtant ce n'est que le troisième roman que je lis d'elle, après "Fille noire, fille blanche" puis - et pas des moindres "Les chutes". Dans ce dernier d'ailleurs, comme dans celui-ci, le personnage de la mère est fort, très fort. 

Ce roman écoute les différentes versions - de presque chacun - des membres de la famille Mulvaney, concernant un évènement qui brisé la vie de cette famille très enviée et respectée dans la petite bourgade de Mont-Ephraïm. Chaque destin est unique et fort, surtout la psychologie des personnages, qui n'est pas juste esquissée, loin de là.

D'abord, il y a Judd, le cadet et petit dernier de la famille, que l'on protège de tout, sauf de lui-même. Le lecteur au tout début, est un peu au même stade de compréhension que lui. Il comprend qu'il s'est passé quelque chose de grave, sans savoir quoi. Ensuite, il y a Marianne, le personnage central - sans tout à fait l'être - de ce récit, qui par peur de faire souffrir sa famille à cause de sa douleur, préfère de ne rien dire et s'effacer, jusqu'à disparaître en tant qu'individu. C'est la victime qui se sacrifie de nouveau pour ne pas voir souffrir les gens qu'elle aime, ce qui la blesserait d'autant plus. Cornellien comme point de vue. Ensuite, il y a les parents, le couple fou amoureux et soudé voire fusionnel, dont la relation va progressivement se déliter, de même - voire à cause - que leur statut social. La psychologie du père notamment est très bien rendue dans les moindres détails, et l'auteur ne peut s'empêcher de le comprendre tout en ayant envie de lui foutre des baffes pour qu'il se reprenne et ouvre les yeux. Enfin il y a les deux frères, l'aîné Mike Junior, la star du lycée qui décide de fuir la situation, et Patrick la tête pensante, véritable génie totalement dans son univers de science, qui ne tolère pas la situation et ne pense qu'à la vengeance.

Ce portrait d'une famille brisée est très bien ficelé, et développé tout en finesse. Le drame psychologique, vu par différents protagonistes, permet au lecteur de se mettre aisément à la place de chacun et d'en ressentir de l'empathie. Les animaux, sont également très présents dans cette histoire, Marianne emmène partout avec elle son chat Muffin. L'auteur, elle-même, possède un chat, qui la soutient d'ailleurs moralement lorsqu'elle écrit. ^^

La narration pose quand même un léger problème d'incohérence, par moment, ce qui ne gêne en rien la compréhension du lecteur. Heureusement, car cela serait dommage, étant donné les personnages et la qualité des développements de l'histoire. Malgré la taille du livre, et la progression assez lente de l'intrigue, le lecteur s'attache facilement à cette famille, et l'empathie qu'il ressent fait le reste.

 étoileétoileétoileétoileétoileétoileétoile

C'est un livre qui traite de beaucoup de sujets fondamentaux (et c'est un peu normal pour un pavé de presque 700 pages) comme les précieux liens qui unissent une famille, l'importance de conserver (ou pas) les apparences, la valeur de l'argent et du regard des autres, la maltraitance psychologique (entre autres), la déchéance, la survie, l'amour, la vie, etc. Après cette lecture, j'aime toujours autant cette auteur qui sait surprendre son lecteur à chaque nouveau roman, et il y en a! ^^
CITATIONS: "Au milieu de la bousculade et des aboiements des chiens, dont le désir d'être emmenés, où que ce fut, reflétait le mien, en l'exagérant, comme souvent les animaux sont des exagérations des êtres humains dans la manifestation brute de leurs émotions."
"Je croie ce que Dieu veut que je croie, Patrick. Je ne Lui demanderais pas plus d'explication sur Ses motifs que je ne souhaiterais entendre l'un d'entre vous me demander pourquoi je l'aime."
"Et là, s'interrrompant de nouveau, maman prenait une profonde inspiration, les yeux étincelant d'une lumière particulière, et elle nous regardait tour à tour... avec un amour si insensé, si démesuré, que mon coeur se serrait, comme si cette femme, qui était ma mère, avait glissé la main à l'intérieur de ma cage thoracique et l'avait pris  dans sa paume, comme on réconforte un oiseau affolé(...)."
"Les secrets! Petit, on a l'impression que le monde en est sillonné comme par des ondes électromagnétiques, que ce sont peut-être même eux qui tiennent l'ensemble. Mais on ne peut pas savoir. Pas pour de bon, comme disent les enfants. Et si l'on tombe par hasard sur un secret, c'est comme si l'on ouvrait une porte là où on ne pensait trouver qu'un mur. On peut regarder de l'autre côté; à la condition d'en avoir le courage ou la témérité, on peut même franchir le seuil... en espérant que ce que l'on apprendra vaudra le prix à payer."
"Une femme persuadée contre son gré en reste toujours à son idée."
"Etrange: quand une lumière s'éteint, c'est aussitôt comme si elle n'avait jamais existé. L'obscurité s'installe de nouveau, totale."
"(...) toute leur vie consciente, ils avaient été frère et soeur, plus proche l'un de l'autre sur le plan génétique qu'ils ne l'étaient de leurs parents. Il avait pourtant l'impression de ne pas connaître Marianne du tout. Il l'aimait mais la connaissait à peine. Ceux qui ont vécu ensemble dans l'atmosphère passionnée de la vie familiale se connaissent à peine. La vie y est trop immédiate, en gros plan. C'est la paradoxe. Le côté déroutant. Exactement le contraire de ce à quoi l'on s'attendrait. Car bien sûr on ne pense jamais à ces relations, quand on les vit. Penser - réfléchir - suppose une dissociation, de la distance. La mémoire ne peut s'exercer qu'une fois éloignée de sa source."
"... d'abord on est jeune, et cela dure si longtemps que l'on croit que c'est éternel, et puis tout d'un coup on ne l'est plus et on ne s'y habitue jamais... et mon Dieu, ça finit toujours de la même façon."
"Et l'ennui avec les gens de ce genre était que, simplement en vous prêtant une attention particulière, ils semblaient vous rendre réel, vous aussi."
"Et avec quelle rapidité le vent se jeta sur eux, un appétit sauvage. En se lamentant comme une hyène, en quittant la vallée d'un hurlement."

 

Challenge Un-mot-des-titres

Challenge ABC 2015

Signature

Publicité
Publicité
Commentaires
L
Depuis le temps que je veux découvrir cet auteur... moins j'y pense et plus j'oublie ^^
Répondre
A
Je note ton livre dans ma Wish. J'aimerai bien découvrir l'auteure et ta chronique donne très envie:)
Répondre
Publicité
Newsletter
Derniers commentaires
Archives
Visiteurs
Depuis la création 242 285
Publicité