Alice Oseman - "L'année solitaire"

3 septembre 2015

Alice Oseman - "L'année solitaire"

405 pages.

Éditions Nathan (2015).

«On est censés vivre la plus belle période de notre vie. On est jeunes, on est en train de décider de notre avenir (c'est en tout cas ce qu'on nous répète), on a des amis. Mais en fait, tous, on attend que quelque chose change. Becky, ma meilleure amie avec qui je rigole de moins en moins. Lucas, qui réapparaît dans ma vie après toutes ces années. Mon frère Charlie, la plus belle personne que je connaisse. Michael Holden, avec son sourire trop grand. Et moi, la fille la plus misanthrope et pessimiste du lycée. On attend tous que quelque chose change.»

INCIPIT: "Je me rends bien compte en arrivant dans la salle commune qu'elle est peuplée en majorité de zombies, dont je fais partie."

"L'année solitaire" est un roman d'une toute jeune auteur de 18 ans - à l'époque où elle l'a écrit. Elle y aborde le mal-être du lycéen de façon très prégnante. Le lecteur suit une année scolaire au côté de la narratrice, qui est plus que blasée de tout, des cours, des profs, des parents, même de ses amis. On pourrait dire qu'elle s'efface et disparaît progressivement. Elle est en manque de motivation et d'intérêt pour vivre sa propre vie. Malgré cette apathie profonde, les gens vivent autour d'elle, sa meilleure (ex?) amie, son frère et ses problèmes, un ancien ami du passé, un nouvel ami du présent...

La plume d'Alice Oseman effleure avec un subtil humour et beaucoup de sarcasme cette vie de lycéen où tout fout le camp, dans laquelle le mal-être va croissant face à la solitude, au pessimisme de la vie - jusqu'au point de rupture? - mais peut-être va-telle finir par réagir?... Un roman au thème similaire refait surface, parce que lu il y a peu, abord le même sujet de façon plus radicale d'ailleurs: "Pardonne-moi, Léonard Peacock" de Matthew Quick.

Les personnages sont dépeints avec subtilité. Tori est attachante, même si le lecteur a plus d'une fois envie qu'elle se bouge, tout en espérant que le récit ne tourne pas en un truc totalement dépressif et larmoyant. Heureusement non, et tout ça - selon moi - grâce au personnage de Michael. Ce type, le nouveau de l'année, un brin loufoque, et intriguant. Il touche Tori au coeur, et leur relation - mais non, rien à voir avec une romance voyons! - va devenir l'intérêt majeur du récit.

Bien sûr, il se passe d'autres choses durant cette "année solitaire", et l'auteur pimente son histoire avec une intrigue qui fait se remuer cette héroïne passive qui ne souhaite qu'une chose, qu'on lui fiche la paix. Mais c'est sans compter sur Solitaire...

Ce livre, c'est l'adolescence à l'état pur. Un roman YA à lire, pour faire comprendre à tous, que le mal-être et le manque de motivation peuvent toucher tout le monde, et qu'il faut apprendre à regarder autour de soi pour s'en sortir, au lieu de se noyer dans une goutte d'eau. En tout cas, une plume à suivre.

CITATIONS: "Je déteste le téléphone. C'est la pire invention de l'histoire de l'humanité, parce que si on ne parle pas, il ne se passe rien. On ne peut pas juste s'en tirer en écoutant et en hochant la tête aux bons moments. On est obligé de dire quelque chose. On n'a pas le choix. Ça me prive de ma liberté de non-expression."

"Tu connais les titres de tous ces bouquins sans en avoir lu un seul! C'est comme s'il pleuvait de l'argent et que tu refusais d'attrapper une seule pièce!"

"Tout le monde a l'air de très bonne humeur aujourd'hui, et je n'aime pas ça. Un soleil assassin saccage tout sur son passage et j'ai dû mettre des lunettes de soleil pour aller au lycée parce que le ciel, une grande piscine toute plate, essaie de me noyer."

"Je me rends tout de suite compte à quel point ce lieu commun est risible. Mais je crois que je l'ai déjà dit, c'est parce que les choses sont vraies qu'elle deviennent des clichés. Une chose est sûre, en tout cas, Michael est trop bien pour moi."