Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Just one more page
20 septembre 2011

"L'ombre du vent" de Carlos Ruis Zafon, pp. 637 - Ed. Le livre de poche - 2010.

Ruiz Zafon

          4ème de couv.

Dans la Barcelone de l'après-guerre civile, " ville des prodiges " marquée par la défaite, la vie difficile, les haines qui rôdent toujours. Par un matin brumeux de 1945, un homme emmène son petit garçon - Daniel Sempere, le narrateur - dans un lieu mystérieux du quartier gothique : le Cimetière des Livres Oubliés. L'enfant, qui rêve toujours de sa mère morte, est ainsi convié par son père, modeste boutiquier de livres d'occasion, à un étrange rituel qui se transmet de génération en génération : il doit y " adopter " un volume parmi des centaines de milliers. Là, il rencontre le livre qui va changer le cours de sa vie, le marquer à jamais et l'entraîner dans un labyrinthe d'aventures et de secrets " enterrés dans l'âme de la ville " : L'Ombre du vent.

          Première phrase.

"Je me souviens encore de ce petit matin où mon père m'emmena pour la première fois visiter le Cimetière des Livres Oubliés."

          Citations:

"Chaque livre, chaque volume que tu vois a une âme. L'âme de celui qui l'a écrit, et l'âme de ceux qui l'ont lu, ont vécu et rêvé avec lui."

"Il n'y a pas de langues mortes, il n'y a que des cerveaux engourdis."

"Cet homme possédait des dons oratoires capables d'anéantir les mouches en plein vol(...)"

"Je me sentis entouré de millions de pages abandonnées, d'univers et d'âmes sans maître, qui restaient plongés dans un océan de ténèbres pendant que le monde qui palpitait au-dehors perdait la mémoire sans s'en rendre compte, jour après jour, se croyant plus sage à mesure qu'il oubliait."

"Elle s'arrêta à mes lèvres, pour les dessiner, toujours en silence, avec l'index et l'annulaire. Ses doigts sentaient la cannelle. Je ravalai ma salive, tandis que mon coeur battait la chamade, et je remerciai la divine providence qu'il n'y eût pas de témoins pour me voir rougir si fort que j'aurais pu allumer un havane à un mètre de distance."

"Et vous, les femmes, vous les aimez comment, Daniel? - A vrai dire, je n'y connais pas grand-chose. - Personne n'y connaît rien, ni Freud ni elles-mêmes, mais c'est comme l'électricité, pas besoin de savoir comment ça fonctionne pour recevoir une secousse."

"Les gens caquettent à qui mieux mieux. L'homme ne descend pas du singe, il descend de la poule."

"Le destin attend toujours au coin de la rue. Comme un voyou, une pute ou un vendeur de loterie: ses trois incarnations favorites. Mais il ne vient jamais vous démarcher à domicile. Il faut aller à sa rencontre."

"Il était vêtu de marbre et portait le monde dans son regard. Je ne me souviens guère des paroles du prêtre ni des visages d'espoir des invités dans l'église par ce matin de mars. Seuls me restent vraiment le goût de ses lèvres et, quand j'entrouvris les yeux, le serment secret que je gardais sur ma peau et dont je me suis souvenu tous les jours de ma vie."

          Lilly's feeling.

En moins de temps qu'il ne faut pour lire une dizaine de pages, le lecteur est happé par ce livre plein de mystères, de rebondissements, d'amours et de haines. L'atmosphère qui se dégage de l'écriture de Zafon est tout simplement incroyable. Son style est poétique, tout en étant grave avec des pointes d'humour qui allègent le côté angoissant de ce récit à la fois romanseque et gothique. Il serait difficile de faire entrer ce roman dans une catégorie particulière. Il mêle des amours tragiques, une enquête sur un écrivain maudit, un parcours initiatique , la passion des livres et une haine profonde, le tout dans la Barcelone d'après-guerre, sous la dictature de Franco.

Mais le tour de force de Zafon, ne se situe pas là, mais dans la mise en abîme perpétuelle qu'il crée tout au long du roman. Un livre dans un livre. Carlos Ruis Zafon a écrit un livre "l'ombre du vent" qui parle d'un livre "l'ombre du vent" écrit par Julian Carax, et lu par Daniel Sempere. Il y a un parallèle entre le lecteur et Daniel, lecteur lui-même dans notre lecture. Le lecteur entre d'autant mieux dans le récit que ce parallèle entre la lecture de Daniel, et celle-ci, permet de s'identifier à cet adolescent, amoureux des livres et captivé par cette histoire. Il y a un parallèle, du même coup, entre Zafon qui pourrait être Carax. Mais, il y a aussi une concordance entre Julian et Daniel. C'est machiavélique, comme une tragédie vouée à se répéter jusqu'à ce que quelqu'un y mette fin (mais chut, il ne faut pas en dire trop...). 

Les personnages sont davantage des émotions que des individus, même s'ils sont parfaitement définis. Les relations entre eux sont un des points forts de l'intrigue. Zafon aborde sous différentes approches, les relations père/fils, celle de Daniel avec son père, mais aussi celle de Carax ou des Aldaya. Il ne ménage ni ses personnages ni son lecteur, à travers des amours tragiques ou impossibles, des haines farouches et destructrices. La malédiction et la mort sont ubiquistes. Ce livre peut faire penser à une tragédie digne de Racine. Mais le personnage le plus attanchant reste Fermin Romero de Torres.^^

Un facteur de cette peur que ressent le lecteur dès qu'un personnage se promène dans Barcelone, est l'inspecteur Fumero. C'est le mal en personne, implacable, sadique et effrayant par la froideur qui émane de lui. Il est traumatisant, véhiculant une angoisse permanente; un poids sur l'estomac apparaît dès que le lecteur suppose sa présence.

Un autre élément important, et omniprésent dans ce récit c'est la ville. Barcelone est un personnage à part entière, avec ses atmosphères, son brouillard, sa misère, ses rues sombres, ses blessures, ses larmes... D'ailleurs, quand le lecteur s'attarde un moment sur le titre: "l'ombre du vent", il repense à Daniel parcourant la nuit, les rues de cette ville pleine d'ombre et de mystère. "L'ombre du vent" caractérise bien cette impression, de sentir quelque chose que l'on ne peut voir. Ce mystère perpétuel, cette présence invisible...

          En bref.

C'est un livre magnifique qui fait passé le lecteur du sourire aux larmes, de l'angoisse à la joie. Et chacun d'entre eux aimerait un jour visiter, comme Daniel et son père, le Cimetière des Livres Oubliés...

          Mes compagnons de [LC] : Tachas, Opaleetoile, Jostein, Auudrey, Praline, Pomm, Lau1307, Aurélie., Gabyelle, Niënor, Soundandfury, Zora, Latite06, Aaliz, Melisende, Favole, PetiteMarie.

          Pour en savoir plus sur l'auteur et le livre.

      Note          étoileétoileétoileétoileétoileétoileétoileétoileétoile

63977422_p

Publicité
Publicité
Commentaires
L
@ Fanchic:<br /> <br /> Merci pour cette critique. Moi aussi j'ai beaucoup aimé ce roman, avec moins de réticences au départ que toi. ^^
Répondre
F
J’ai choisi de lire « L'Ombre du vent » après avoir lu un certain nombre de critiques dithyrambiques. En général, je le sais, je suis déçu (et c’est d’ailleurs ces déceptions qui m’ont conduit à ouvrir ce blog), c’est donc sur la défensive que je commence la lecture de ce livre et de ses 524 pages.<br /> <br /> <br /> <br /> Mais cette fois-ci, la chimie (pour ne pas dire l’alchimie) de Carlos Ruiz Zafón fonctionne. Dès les premières pages on est embarqué. Pourtant le sujet n’est pas léger, loin s’en faut. À la fin de la 2ème guerre mondiale un petit garçon d’à peine 10 ans, Daniel Sempere, vient de perdre sa mère. Son père, libraire spécialisé dans le commerce de livres anciens, l’emmène dans un lieu caché, connu d’un nombre très limité de personnes : le cimetière des livres oubliés. De ce passage initiatique, il en ressortira avec un livre choisi au hasard, « L'Ombre du vent » écrit par un inconnu, Julian Carax, qu’il n’aura de cesse de rechercher et qui marquera définitivement sa vie.<br /> <br /> A mi chemin entre les romans d’horreur de Stephen King (« Christine » : une voiture maléfique aliène le libre arbitre d’un jeune qui en fait l’acquisition, ça ne vous rappelle rien ?) et les romans érudits d’Umberto Eco (« Le Pendule de Foucault » : de jeunes éditeurs et universitaires travaillent sur les Rose-Croix, une secte ésotériques a priori disparue, et se retrouvent pris dans le tourbillon de l’Histoire cachée, ça ne vous rappelle toujours rien ?), il y a du souffle dans cette œuvre, beaucoup de souffle.<br /> <br /> <br /> <br /> Les personnages sont biens campés et l’histoire qui les a façonnés ne nous est dévoilée qu’à la fin. Tout est fait pour nous maintenir en haleine et ça marche. Les personnages secondaires, le père bienveillant mais dépassé par les événements et par l’adolescence de son fils, Fermin Romero de Torres, l’ami fidèle que Daniel a sorti de sa condition de clochard, le terrible policier Francesco Javier Fumero qui n’est pas sans rappeler les pires agents zélés de la Gestapo, l’énigmatique Julian Carax mythe ou réalité sont là, se croisent, entrent en collision, étayent l’histoire.<br /> <br /> <br /> <br /> En bref, je ne me suis pas ennuyé une seconde à la lecture de ce livre que je recommande chaudement. <br /> <br /> <br /> <br /> http://fanchic2011.blogspot.fr/2012/06/lombre-du-vent.html
Répondre
L
@ PetiteMarie:<br /> Contente que ce livre t'ai plû. Merci de ta visite. A la prochaine [LC]. ^^
Répondre
P
Je ne vais pas être très originale : Merci pour cette LC ! Grâce à elle, ce roman est enfin sorti de ma PAL, je crois que j'aurai eu du ma à me motiver seule alors que je l'ai beaucoup apprécié ! ^_^
Répondre
L
@ Favole:<br /> Ce fut un plaisir. ^^<br /> Une [LC] Zafon #2 est prévue, si ça t'intéresse.
Répondre
Publicité
Newsletter
Derniers commentaires
Archives
Visiteurs
Depuis la création 242 254
Publicité